Santé mentale des français à l'ère du covid
Dans tous les médias, nous lisons régulièrement que les jeunes sont les plus touchés psychologiquement par l’épidémie. Même notre président l’a reconnu : « Oui, c’est dur d’avoir 20 ans en 2020 » et en spécifiant : « Je ne donnerai jamais de leçon à nos jeunes parce que ce sont eux qui, honnêtement, vivent un sacrifice terrible » … « examens annulés, l’angoisse pour les formations, l’angoisse pour trouver un premier job ».
Avant de faire un zoom sur les enfants et les adolescents, jetons un œil sur les chiffres clés dans la population générale d’adultes. Pourquoi ? En tant que psychologue, je rejoins l’idée bouddhiste de l’importance de s’aider soi-même, avant d’aider les autres. Et en regardant les statistiques, nous les adultes, ne semblent pas aller très bien non plus.
Depuis mars 2020, Santé publique a lancé une enquête auprès d’environ 2000 adultes résidant en France métropolitaine afin de suivre la santé mentale pendant l’épidémie. Je me réfère à la 21ème mesure qui a été faite mi-février 2021.
- Satisfaction de vie : Plus de trois quarts des Français interrogés se déclarent satisfait de leur vie. Comparé à mars 2020, ce taux est supérieur mais reste inférieur à celui observé hors période d’épidémie (mesurée en 2017).
- Anxiété : Les états anxieux (tension, irritabilité) ont connu une forte augmentation en mars 2020 et puis une courbe instable. Aujourd’hui, un an après, 23% des Français déclarent un état anxieux, comparé à 14% hors période d’épidémie.
- Dépression : L’évolution des états dépressifs (tristesse, perte d’intérêt, d’énergie) ressemble à celle de l’anxiété avec une hausse importante en avril 2020. Aujourd’hui, 23% des Français montrent un état dépressif, ce qui signifie une augmentation même par rapport au début du premier confinement (20%). En 2017, le taux était à 10%.
- Sommeil ; Les troubles de sommeil ont augmenté également, en passant de 49% en 2017, à 61% en mars 2020 et 66% aujourd’hui.
7 facteurs de vulnérabilité communs à la population générale
En analysant les profils des personnes ayant une santé mentale plus dégradée, les facteurs de vulnérabilité suivants se dessinent :
- Antécédent de troubles psychologiques
- Symptômes du Covid-19
- Situation financière difficile
- Sans activité professionnelle et chômeurs
- Femmes (spécifiquement pour l’anxiété et problèmes de sommeil)
- 18–34 ans, étudiants
- Logement surpeuplé (moins de 18 m² par personne ou moins de 25 m2 pour les personnes vivant seules)
Des tabous à dépasser
Quelques soient les caractéristiques sociodémographiques et les conditions de vie des personnes interrogées, les émotions ressenties à l’égard de la situation épidémique (telles que la peur, l’inquiétude pour sa santé, pour sa situation économique, la frustration, la colère ou encore les sentiments de solitude et d’isolement) sont associées à une santé mentale plus dégradée.
Les chiffres confirment que la crise sanitaire a eu un impact sur la vie et la santé mentale des adultes. Puis que notre quotidien continue à être perturbé, n’hésitez pas à solliciter de l’aide si vous rencontrez des difficultés comme mentionnées plus haut. Je vous invite aussi à repérer les personnes de votre entourage qui se trouve en souffrance psychologique et de les encourager à consulter un professionnel. D’après un sondage fait par Doctolib en décembre 2020, « 55% des psychologues estiment que les patients ne sont pas assez bien informés de l’importance de prendre soin de leur santé mentale. Ils vivent avec leur « mal-être », et attendent d’aller vraiment mal pour consulter. » (Doctolib, 2020)
Les tabous autour de la santé mentale sont toujours d’actualité. 35% des psychologues observent encore une stigmatisation des patients qui vont voir un/e psychologue…
Focus sur la santé mentale des jeunes
La Jed Foundation a mené une étude à l’automne 2020 en interrogeant plus de 2000 parents d’enfants mineurs (2 à 18 ans) ainsi que près de 900 adolescents (13 à 18 ans) autour de leur bien-être pendant la pandémie du Covid19.
60% des parents expriment que leur enfant a vécu des problèmes de santé mentale ou émotionnels. Les difficultés les plus rencontrées étaient la solitude/l’isolement, l’anxiété et les troubles de concentration. Parmi les ados interrogés, plus de 50% disent avoir rencontré des problèmes de santé mentale ou émotionnels
Parents d’enfants mineurs (2 à 18 ans) | 900 adolescents (13 à 18 ans) | |
Problèmes de santé mentale ou émotionnels au cours du dernier mois | 60 % | 53 % |
| 23 % | 20 % |
| 22 % | 28 % |
| 20 % | 21 % |
| 5 % | 30 % |
8% des parents des enfants de 9 à 12 ans, rapportent que leurs enfants ont des idées suicidaires. 3 sur 10 adolescents expriment avoir eu des idées noires.
La préoccupation première des parents (80%) et des adolescents (71%) est la durée de la pandémie.
Santé mentale des jeunes : les filles plus touchées que les garçons
Un autre sondage national mené par l’Université de Michigan confirme les résultats ci-dessus. De plus, les filles semblent bien plus touchées que les garçons.
En France, aucune étude auprès de parents ou enfants de la même ampleur qu’aux Etats-Unis semble avoir été réalisée. Néanmoins, des indicateurs de la santé mentale des jeunes français sont disponible. Santé publique France (2021) enregistre toutes les semaines les passages aux urgences du réseau Oscour® et actes médicaux SOS Médecins. Voici le point de la semaine du 22 mars 2021 pour les enfants de moins de 15 ans :
- Après 2 semaines de hausse consécutive suite à la reprise scolaire après les vacances d’hiver, les passages pour geste suicidaire sont en baisse : 153 passages en S11 (vs 191 en S09 soit -20%). En comparaison avec les deux années précédentes, Le niveau observé reste supérieur (95 en S09-2020 et 119 en S09-2019).
- Le nombre de passages aux urgences pour troubles anxieux et de l’humeur s’est stabilisé à un niveau élevé, qui est supérieur à celui des deux années précédentes, presque 2 fois plus pour les troubles de l’humeur.
La détresse psychologique des étudiants
Continuons avec les étudiants. Un sondage a été réalisé fin janvier 2021 par le Figaro Étudiant auprès de plus de 2500 étudiants toutes filières confondues.
Cette étude montre que :
- 8 étudiants sur 10 s’inquiètent de leur insertion sur le marché de l’emploi, de leur réussite scolaire mais aussi de leur santé mentale.
- Deux tiers se sentent tourmentés par le contexte sanitaire en France et par l’avenir du pays ; plus de 90 % pensent que le contexte économique et social est inquiétant
- Près d’un étudiant sur 10 a régulièrement des pensées suicidaires
- Plus de la moitié d’entre eux (55%) déclare rencontrer des problèmes de sommeil.
- 15% des étudiants ont tout de même recours aux produits psychoactifs pour gérer le stress (drogues, anxiolytique…).
- Plus d’un étudiant sur deux a le sentiment de passer à côté de sa vie d’étudiant (53%), 54% d’entre eux ont déjà pensé à arrêter leurs études depuis le début de la crise sanitaire.
- Deux tiers des étudiants se sentent « abandonnés » depuis le début de la crise sanitaire. Pire, ils sont même 56% à estimer avoir été « sacrifiés » par le gouvernement.
Que FAIRE FACE A LA SITUATION EN TANT QUE PARENT/PROFESSEUR ? QUE proposer à ces jeunes ?
En ce qui concerne spécifiquement la détresse psychologique des étudiants, une étude menée à l’Université de Rennes auprès de presque 800 étudiants montre des chiffres plutôt alarmants : presque un étudiant sur 4 présente des symptômes de dépression, 4 sur 10 des symptômes d’anxiété et plus d’1 sur 2 se sent seul(e).
Cet état de lieu sur la santé mentale suite à la pandémie du Covid-19 montre qu’un chamboulement du quotidien entraine des souffrances psychologiques chez les enfants, adolescents et jeunes adultes non-négligeables. Avant qu’une pandémie mondiale vienne bousculer les habitudes d’une génération qui s’épanouissait notamment à travers ses interactions sociales, l’adolescence était considérée comme la plus belle époque par les aînés (entre expérimentations en tout genre, nouvelles rencontres, et sentiment d’indépendance). En tant que parents, enseignants et psychologues, nous sommes des personnes clés dans le développement de résilience des jeunes. Chacun peut apporter sa contribution :
- encourager le jeune à participer à des ateliers collectifs ou un accompagnement individuel
- s’offrir une expérience d’éducation positive afin de transformer sa posture de parent ou enseignant
- se former à l’éducation positive pour semer des graines
NOS PROPOSITIONS A POSITRAN :
- Vous vous sentez touché personnellement par cette situation et vous êtes enfants, adolescents ou étudiants ? Avez vous envie de participer à un atelier collectif ou parler avec quelqu’un ? Larissa a l’habitude et vous pouvez lui écrire un email à larissa@positran.fr
- Parent, enseignant, aidant : vous pouvez vous offrir une expérience d’éducation positive pour faire évoluer votre posture avec trois parcours en fonction de vos besoins et envies. Découvrez les 3 parcours expériences / facilitations :
- iStep (ISTEP Parents (Innovation, Sciences et Techniques en Education Positive),
- BECS (Bien-Être et Climat Scolaire),
- SPARK Résilience©
- Envie de vous former plus globalement à l’Education positive pour semer des graines
Un blog écrit par Larissa Kalisch, responsable éducation à Positran
Les sources
- Doctolib (2020). Santé mentale des Français : agir face aux impacts de la Covid19.